PLUG’N PLAY: Times (2014)

Personnal :

Fred Randrianasolo : lead & backing vocals

Christophe Andrieu : guitars & backing vocals

Michel « Alan » Brassart : guitars & backing vocals

Eric Varache : drums & percussion

Julien Boisseau : bass & backing vocals
Rich Randrianasolo : everything else

Additionnal guitars : Fred Solo

Titles :

01- Far Away

02- The Next 7 Years

03- Time To Go

04- Right Now

05- Limo

06- Crash

07- Show Me The Way

08- RM Blues

09- Hit & Run

10- November

11- Running With The Gun

12- Take Me Out

Et bien cet album, on ne peut pas dire que je ne l'aurais pas écouté ! Sur tous les lecteurs possibles, j'en ai profité, sans arriver à me lasser. « Difficile de donner son avis sur le travail des potes » écrivait le regretté John Molet. C'est vrai, mais cette fois, je ne vais pas avoir trop de scrupules pour dire à quel point j'ai apprécié cet album, que je trouve encore meilleur que le précédent.
D'emblée, on se retrouve en pays connu, avec toujours cette rythmique remarquable et ses chœurs fonctionnant en questions/réponses, mais avec quand même l'impression que quelque chose a changé : on a toujours un gros son, mais les guitares se font plus tranchantes, plus « métalliques », peut-être l'acidité de la Telecaster très présente sur cet album dans les mains d'Alan participe-t-elle à ce côté incisif. « Far Away », par exemple, entame les débats de façon très agressive, sans éluder une certaine brutalité, ce qui met d'emblée l'auditeur dans le bain. Les breaks abrupts et les fins soudaines participent au sentiment d'écouter une musique plus « industrielle ». Par moment, on entendrait presque les marteaux frapper les pièces en fusion sur les enclumes dans un jaillissement d'étincelles. Rien ne traîne, ce qui donne un côté brut de fonderie aux compositions, soutenues par une rythmique impeccable, on ne le dira jamais assez, où Julien Boisseau semble s'être parfaitement intégré, alors qu'en fait tout est subtilement agencé. Rapidement, une autre donnée vient s'ajouter : la voix de Fred semble se mouvoir plus à son aise dans les arrangements. Plug'n Play a changé quelques points dans sa méthode de travail et cela convient visiblement très bien à notre chanteur qui à mon avis peut mieux faire valoir ses qualités. Rapidement, l'album trouve son rythme de croisière. Au passage « Right now » nous offre une belle illustration de la différence de style entre les deux guitaristes du groupe. Certains morceaux ont été rodés depuis assez longtemps sur scène par le groupe, et cela doit certainement contribuer à la fluidité de l’interprétation. Les titres concoctés par Rich évoluent eux aussi petit à petit au fil des albums vers une touche plus personnelle, aidés par la volonté du groupe d'avoir un son original, et il y a fort à parier que des titres comme l'intriguant « Time To Go », le pétaradant « Right Now », « Limo », avec sa basse grondante et ses guitares hachoirs tailladant nos oreilles dans une sanglante partie de ping-pong, l'entraînant et punchy « Show Me The Way », et le bien carré mais très swinguant « Take Me Out », avec des arpèges très Wishbone Ash 1989 comme clin d’œil, deviendront des classiques du groupe : ils ont déjà fait leurs preuves sur scène. Mais le groupe n'oublie pas ses racines. « RM Blues » puise son inspiration dans un blues tout ce qu'il y a de plus poisseux, déchiré, mâtiné de touches « beatlesques », on pourrait même dire « lennoniennes » : « Year Blues » n'est pas si loin, tandis que « Running With The Gun » nous renvoie à un lourd boogie très ZZ Topien, dans une atmosphère menaçante, genre que le groupe maîtrise parfaitement depuis des années, et une fois de plus c'est réussi. « Hit & Run », au son très « métallurgique », paraît se situer très loin d'une musique « root » et illustre une sorte de folie chaotique sertie d'un solo double de guitares épileptiques, mais se termine pourtant fugitivement en… blues acoustique ! Ce même blues acoustique qui entame brièvement le mélancolique « Crash » à l'atmosphère incertaine. Au fil des écoutes, on retrouve toujours quelque chose à découvrir, comme l'orgue de « November » (Rich ?) ou un autre détail de l'architecture sonore. Quel boulot !
Ajoutons aux plaisirs une très belle jaquette en noir et blanc, de présentation très soignée qui reflète l'ambiance assez sombre de l'album, avec un petit livret renfermant les paroles et de superbes portraits des musiciens du groupe : la classe !

Après, tout est affaire de style, à chacun ses goûts, mais si vous aimez la démarche originale de Plug'n Play, alors il ne faut hésiter sous aucun prétexte : j'espère que cet album passionnant vous captivera autant que je l'ai été. Cet excellent CD amène une vraie plus-value, une touche personnelle, et vient encore renforcer l'impression de qualité que délivre la scène française qui tourne autour du boogie. Reste à espérer que Times sera bien accueilli par le public, que le bouche à oreille fonctionnera et que tout ce petit monde connaîtra enfin un succès qui serait on ne peut plus mérité. Vous êtes d'accord ? Alors à vous de jouer !

Y. Philippot-Degand